Hyperplans, formes linéaires

Soumis par Mohamed AL le mar 18/05/2021 - 23:24

Dans tout ce qui suit, $\K$ désigne l'un des corps $\R$ ou $\C$ et $E$ un espace vectoriel sur $\K$ de dimension finie ou infinie. Le but de cet article est de donner quelques idées sur les hyperplans en dimension fini et infinie, le lien avec les formes linéaires et la caractérisation de la continuité d'une forme linéaire avec la nature de son noyau.

 

DEFINTION D'UN HYPERPLAN

Proposition: Soit $F$ un sous-espace vectoriel de $E$. Si $G_1$ et $G_2$ sont deux sous-espaces vectoriels de $E$ tel que $F\oplus G_1=F \oplus G_2=E$, alors $G_1$ et $G_2$ sont isomorphes.

 En effet, si, pour tout $k\in\{1,2\}$, on note $\pi_k$ la projection sur $G_k$ parallèlement à $F$ alors, si on définit $k'=1$ si $k=2$ et $k'=2$ si $k=1$, l'endomorphisme  $\pi_k$ induit une application linéaire $f_k: G_{k'} \to G_{k}; x\mapsto f_k(x)=\pi_k(x)$ et on peut démontrer que $f_1$ et $f_2$ sont bijectives et que $f_2=f_1^{-1}$. En effet soit $x\in \ker f_2$ donc $x\in G_1$ et $f_2(x)=0=\pi_2(x)$, or $x-\pi_2(x)\in F$, il en découle que $x\in F$, donc $x\in F \cap G_1$, donc $x=0$ car $G_1$ et $F$ sont supplémentaires. Pour la surjection: Soit $y\in G_2$. Soit $x=\pi_1(y)$, alors  $x\in G_1$. On a $y-x=y-\pi_1(y)$, donc $y-x\in F$, donc $\pi_2(y-x)=0$, donc $\pi_2(y)=\pi_2(x)$ et comme $y\in G_2$, on a $\pi_2(y)=y$, donc $y=\pi_2(x)=f_2(x)$ car $x\in G_1$, donc $f_2$ est surjective et finalement $f_2$ est un isomorphisme. On vient de voir que l'unique antécédent de $y$ est $x=f_1(y)$, donc $f_2^{-1}=f_1$.

Ceci permet de donner la définition suivante:

Proposition-Définition: Si un sous-espace vectoriel $F$ de $E$ admet un supplémentaire de dimension $m$ avec $m\in \N$, alors $m$ ne dépend que de $F$ et on dit que $F$ est de codimension $m$. On note $m=\text{codim}(F)$.

 

On  définit ci-dessous la notion d'hyperplan

Définition: On appelle hyperplan de $E$ tout sous-espace vectoriel $H$ de $E$ de codimension $1$.

Ainsi un sous-espace vectoriel $H$ de $E$ est un hyperplan de $E$ si et seulement si  il existe un vecteur $a$ de $E$ tel que $a\not\in H$ et $H\oplus \K a = E$.

On a donc les remarques importantes suivantes :

  1. Si $H$ est un hyperplan de $E$ alors $H\neq E$, en effet par définition, il existe $a\in E\bsl H$ tel que $E=H\oplus \K a$, donc $H\neq E$.
  2. si $H$ est un hyperplan de $E$ alors  pour tout vecteur $b\in E$, on a $b\not\in H$ si seulement si  $H\oplus \K b= E$. En effet si $H$ est un hyperplan et $b\in E$ tel que $H\oplus \K b=E$, alors $b\in H\im H \oplus \K b=H$, ce qui donne $H=E$, or ce n'est pas le cas en vertu de la remarque 1 ci-dessus. Réciproquement si $b\in E \backslash H$, comme $H$ est un hyperplan, il existe $a\in E\bsl H$ tel que $E=H\oplus \K a$, donc $b$ s'écrit $b=h+\la a$, avec $(h,\la)\in H\times \K$. Si $\la=0$, on aurait $b\in H$, ce qui n'est pas le cas, donc $\la \neq 0$ et $a=\frac{1}{\la}(b-h)$. Soit $x\in E$ tel que $x=h_1+\la_1 a$ avec$(h_1,\la_1)\in H\times \K$, donc $x=h_1+\la_1\(\frac{1}{\la}(b-h)\)=h_2+\la_2b$ avec $h_2=h_1-\frac{\la_1}{\la}h$ et $\la_2=\frac{\la_1}{\la}$. Il en découle que $E=H+\K b$. Si $x\in H\cap \K b$ alors $x=h=\la b$ et si $\la\neq 0$, on aurait $b=\frac 1\la h \in H$, donc $b\in H$, ce qui n'est pas le cas. Donc $\la=0$ et $x=0$, donc $E=H\oplus \K b$.
  3. Si $H$ est un hyperplan de $E$ et $H'$ un sous-espace vectoriel de $E$ tel que $H\subset H'$ alors $H'=H$ ou $H'=E$. En effet si $H'\neq H$, il existe $b\in H'$ tel que $b \not\in H$, donc par la remarque 2 ci-dessus on aurait $H\oplus \K b= E$ et comme $H\subset H'$ et $b\in H'$, on a $H+\K b \subset H'$, donc $E\subset H'$ et finalement $H'=E$. 

HYPERPLAN ET FORME LINEAIRE

Un hyperplan est le noyau d'une forme linéaire non nulle et réciproquement pour toute forme linéaire non nulle $\phi$ sur $E$, on a  $\ker(\phi)$ est un hyperplan.

Théorème: Soit $(E,\|.\|)$ un espace vectoriel normé et $\ph$ une forme linéaire sur $E$, alors $\ph$ est continue si et seulement si $\ker(\phi)$ est fermé.

En effet, si $\ph$ est continue $\ker(\ph)=\ph^{-1}(\{0\})$ est  un fermé de $E$ car $\{0\}$ est un fermé de $\K$. Réciproquement, si $H=\ker(\ph)$ est un fermé de $E$, si $\ph$ est nulle, alors $\ph$ est continue, sinon il existe $b\in E$ tel que $\ph(b)\neq 0$, en posant $a=\frac{b}{\ph(b)}$, on a $\ph(a)=1$; Soit $H'=a+H$; si on note $t_{-a}$ la translation de vecteur $-a$, on a $H'=t_{-a}(H)$ et comme $t_{-a}$ est continue(car lipschitzienne de rapport $1$), on peut affirmer que $H'$ est un fermé de $E$, on peut aussi remarquer que  $H'=\{x\in E/ \ph(x)=1\}$, ce qui donne une autre preuve du fait que $H'$ est fermé comme image réciproque par $\ph$ du fermé $\{1\}$ de $\K$. Remarquons que $0\not\in H'$ car $\ph(0)=0\neq 1$, donc, par fermeture de $H'$, il existe $r > 0$ tel que la boule ouverte $B(0,r)$ réalise $B(0,r)\cap H'=\emptyset$. Nous allons prouver que $\fa x \in B_f(0,r), |\ph(x)| \leq 1$, sinon il existe $x_0\in B_f(0,r)$ tel que $\ph(x_0)| > 1$. Pososn $x_1=\frac{x_0}{\ph(x_0)}$, on a $\ph(x_1)=1$, donc $x_1\in H'$ et par suite $(\star),\quad x_1\not\in B(0,r)$, or  $\|x_1\|=\frac{\|x_0\|}{|\ph(x_0)|}$, donc compte tenu de $|\ph(x_0)| > 1$, on a $\|x_1\|  \leq  \|x_0\| < r$, donc $(\star)',\quad x_1\in B(0,r)$ et $(\star)$ et  $(\star)'$ sont en contradiction, donc on a bien :  $\fa x \in B_f(0,r), |\ph(x)| \leq 1$. Soit $x\in E$ tel que $x\neq 0$, alors $x'=\frac{r}{2\|x\|} x$ réalise  $\|x'\|=\frac r2$, donc  $x'\in B(0,r)$ et alors  $|\ph(x')| \leq 1$, donc  $(\star\star),|\ph(x)| \leq  k \|x\|$ où  $k=\frac{2}{r}$, et $(\star\star)$ est valable aussi pour $x=0$, donc pour tout $x\in E$, ce qui prouve que $\fa x\in E, |\ph(x)| \leq k \|x\|$, et la continuité de $\ph$.